FRANÇAIS
Analyse et commentaires de monsieur Gil Thériault, directeur de l’Association des chasseurs de phoque intra-Québec, face au rapport intitulé « Assurer l’avenir de la chasse au phoque : Passons à l’action ». « Au mois de mai 2024, le Comité sénatorial permanent des pêches et des océans a publié ce rapport. Bien qu’il soit toujours intéressant que des personnes bénéficiant d’une certaine couverture médiatique s’intéressent à l’industrie du phoque, il y a très peu de chances que ce rapport change quoi que ce soit à la situation actuelle. Ce rapport soulève tout de même quelques points intéressants. Il critique vertement la gestion déficiente du Ministère des Pêches et des Océans (MPO), ce qui va de soi lorsque l’on regarde l’état général actuel des pêcheries. Il émet également une recommandation visant à resserrer la Loi de l’impôt sur le revenu afin d’empêcher les nombreux groupes produisant de la désinformation sur la chasse aux phoques de profiter d’exemptions fiscales. À condition qu’elle soit appliquée, ce qui serait très étonnant, cette recommandation arrive toutefois un demi-siècle trop tard. Malheureusement, la liste des critiques envers ce rapport est beaucoup plus longue que celle des éloges. Premièrement, comme un rapport du même comité intitulé « La Gestion durable des populations de phoque gris : vers le rétablissement des stocks de morue et autres poissons de fond » est sorti en octobre 2012 et qu’absolument aucune de ses recommandations n’a été suivie, il persiste un gros doute quant à l’impact réel qu’aura celui-ci. Autrement dit, les sommes investies pendant deux ans dans ce document auraient sans doute mieux servi l’industrie elle-même. Ensuite, le Comité sénatorial n’a tenu compte que de deux réalités dans son rapport : celles des Autochtones et celles des Terre-Neuviens, ignorant totalement celles du Québec et des Maritimes, pourtant très affectés par les manquements flagrants dans la gestion de ce féroce prédateur marin. On y mentionne à peine les percées majeures sur le marché de la viande initiées par la Boucherie Côte-à-Côte, alors qu’il s’agit d’un tour de force phénoménal qui devrait servir d’inspiration à tous les intervenants du secteur. Essentiellement, le rapport suggère d’investir davantage dans 1) la science, 2) le marketing et 3) les marchés internationaux. L’accumulation de données scientifiques probantes demeure toujours intéressante, mais en ce qui concerne le dossier du phoque, nous en avons suffisamment pour justifier une action, et pourtant, rien ne bouge. Pourquoi ? Parce que le dossier est politique. Est-ce que davantage de données rationnelles vont y changer quelque chose ? On peut fortement en douter. Concernant le marketing, à nouveau, des investissements dans ce secteur sont nécessaires, mais pas avant de pouvoir fournir aux acheteurs potentiels des produits de haute qualité en quantité suffisante et à des prix concurrentiels. Et, sur ce plan également, il y a loin de la coupe aux lèvres. Il faut, avant toute chose, réviser l’ensemble de la réglementation entourant la chasse aux phoques. Elle est complètement désuète, débilitante et ne vise qu’à réguler la chasse au phoque du Groenland, alors que le Québec et les Maritimes ne s’intéressent qu’au phoque gris. Ensuite, il faut mettre sur pied des centres intégrés de valorisation du loup-marin où tous les sous-produits seront optimisés. Ces centres se chargeront de développer des protocoles de manipulation ciblés pour chaque sous-produit et formeront les chasseurs à les respecter afin de rendre à nouveau rentable cette activité cynégétique ancestrale et nécessaire. Seulement une fois ces étapes franchies devrait-on investir dans le marketing. Et encore, pas pour l’étranger, mais pour les marchés de proximité. Des sommes et des énergies considérables ont déjà été investies sur les marchés étrangers, mais à chaque fois qu’une porte s’ouvre, les groupes anti-chasse manifestent aux endroits stratégiques pour que ces portes se referment aussitôt. Apprenons donc des erreurs du passé et développons avant tout les marchés sur lesquels nous avons un certain contrôle, c’est-à-dire les nôtres. L’achat de proximité, la consommation de produits locaux, l’autonomie alimentaire sont d’ailleurs des termes très en vogue de nos jours. Profitons-en donc. Certaines sommes ont également été investies (ou dépensées, c’est selon) dans des campagnes d’information et de sensibilisation. Des décennies d’expérience nous montrent que la meilleure façon de changer les mentalités récalcitrantes sur ce dossier est de mettre sur le marché des produits de grande qualité, comme le fait d’ailleurs la Boucherie Côte-à-Côte des Îles de la Madeleine. Méconnu d’une grande partie de la population, le dossier de la chasse aux phoques revêt peu d’importance. Mais ceux qui s’y intéressent vraiment réalisent qu’il s’agit d’une activité cruciale pour le maintien de l’équilibre des écosystèmes marins du golfe du Saint-Laurent. Si les gouvernements persistent dans leur inaction, il faudra bien que l’industrie de la pêche s’occupe elle-même de ce dossier, en espérant qu’il ne soit pas déjà trop tard. Il en va de l’avenir des pêcheurs et des centaines de petites communautés côtières que leurs activités soutiennent ! » - Gil Thériault, directeur de l’Association des chasseurs de phoques intra-Québec |
ANGLAIS Analysis and comments by Mr. Gil Thériault, Director of the Intra-Quebec Sealers Association, in response to the report titled « Ensuring the Future of Seal Hunting: Let's Take Action » « In May 2024, the Senate Standing Committee on Fisheries and Oceans released this report. While it's always encouraging when figures with media coverage take interest in the seal industry, there's very little chance this report will change the current situation. Nevertheless, the report raises some interesting points. It strongly criticizes the inadequate management by the Department of Fisheries and Oceans (DFO), which is unsurprising given the current state of fisheries overall. It also makes a recommendation to tighten the Income Tax Act to prevent numerous groups producing misinformation and disinformation about seal hunting from receiving tax exemptions. However, even if applied, which would be highly unlikely, this recommendation comes half a century too late. Unfortunately, the list of criticisms of this report is much longer than the praises. Firstly, similar to a previous report by the same committee titled "Sustainable Management of Grey Seal Populations: Towards the Recovery of Cod and Other Groundfish Stocks," released in October 2012, none of its recommendations have been followed. This casts serious doubt on the real impact this new report will have. In other words, the funds invested over two years in this document would likely have been better spent directly on the industry itself. Furthermore, the Senate Committee only took into account two realities in its report: those of Indigenous peoples and Newfoundlanders, completely ignoring Quebec and the Maritimes, despite these regions being heavily affected by glaring deficiencies in managing this fierce marine predator. It barely mentions significant breakthroughs in the meat market initiated by Boucherie Côte-à-côte, which is a phenomenal feat that should serve as inspiration for other stakeholders in the sector. Essentially, the report suggests investing more in 1) science, 2) marketing, and 3) international markets. The accumulation of solid scientific data remains interesting, but when it comes to the seal issue, we already have enough to justify taking action, yet nothing moves. Why? Because the issue is political. Will more rational data change anything? One can strongly doubt it. Regarding marketing, again, investments in this sector are necessary, but not before we can provide potential buyers with high-quality products in sufficient quantities and at competitive prices. And even on this front, there is a long way to go from theory to practice. First and foremost, we need to revise all regulations surrounding seal hunting. They are completely outdated, debilitating, and only target harp seals, whereas Quebec and the Maritimes are only interested in hunting grey seals. Next, integrated seal processing centers must be established where all by-products are optimized. These centers will develop targeted handling protocols for each by-product and train hunters to respect them in order to make this ancestral and necessary hunting activity profitable again. Only after these steps should we invest in marketing. And even then, the focus should be on local markets rather than foreign ones. Considerable sums and efforts have already been invested in foreign markets, but every time a door opens, anti-hunting groups protest at strategic locations to ensure these doors quickly close again. Let's learn from past mistakes and primarily develop markets where we have some control—our own. Local purchasing, consumption of local products, and food self-sufficiency are indeed very trendy terms nowadays. Let's take advantage of them. Some funds have also been invested (or spent, depending on perspectives) in information and awareness campaigns. Decades of experience show us that the best way to change stubborn mindsets on this issue is to bring high-quality products to the market, as Boucherie Côte-à-côte in the Magdalen Islands is already doing. Unbeknownst to much of the population, the seal hunting issue holds little importance. But those who truly care realize it is crucial to maintaining the balance of marine ecosystems in the Gulf of Saint Lawrence. If governments persist in their inaction, the fishing industry will have to personally take care of this issue, hoping it's not already too late. The future of fishermen and the hundreds of small coastal communities they support hangs in this issue.» - Gil Thériault, Director of the Intra-Quebec Sealers Association |